Présences

[actualisé le 13/07/2016]

présence-3

Elles n’étaient pas assez nombreuses pour plusieurs présences.
Cela diminuait un peu le plaisir
mais la joie du cadeau ainsi offert,
qui jouait des milliers de nuances de couleurs de leur corps
était prodigieuse.
Rare bien sûr,
car la fatigue était grande pour ces petites créatures peu habituées
à ce genre de  prouesse
et puis
elles avaient aussi le travail de la journée.


Le résultat était tout à fait étonnant, la présence semblait réelle, toutes les nuances de l’être disparu étaient rendues par le nuage de ces petits êtres multicolores qui souhaitaient tant apaiser la tristesse de Tamel.


Damouce marchait lentement sur la terre poussiéreuse du sentier qui serpentait entre les arbres. Avec de temps à autres des à-coups, de ces maladresses du corps pleines de cette grâce propres aux tout jeunes enfants dont le pas n’a pas encore été discipliné par la promenade et les intervalles réguliers de la montre.
Tamel reconnaissait son amie, même s’il peinait un peu à saisir la lumière de son regard.
Elle portait une robe légère aux plis froissés par le vent qui lui laissait les bras et le bas des jambes à nu.
Damouce ramassa quelques cailloux, un morceau de mousse sur une pierre, un escargot qu’elle posa délicatement au cœur d’un buisson aux feuilles fraîches, bien à l’écart du chemin, puis elle s’évanouit, se dispersa dans le vol des abeilles.

Ses amies  s’en retournaient à leurs obligations quotidiennes, après avoir offert à Tamel quelques instants de grâce puisés au fond de sa mémoire.
Demain peut-être, pour quelques secondes, elles lui redonneraient la présence d’Archos ou de sa mère.


Essai de lecture du texte

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je lis « Asile » – avec les mots de Maryse Hache et la mémoire de l’oeil de Tina Kazakhishvili

Je lis
[par minuscules gorgées de texte
et regards espacés sur les photographies
parce que tout y est si dense que
ces petites goulées suffisent à me submerger pour quelque temps]
je lis « Asile ».

Avec les mots de Maryse Hache et la mémoire de l’oeil de Tina Kazakhishvili
(http://www.publie.net/livre/asile/)

La phrase de Maryse Hache, (sans lame à trancher le flots des mots*) mêle et fond les extérieurs et intérieurs des âmes et des choses, tant des personnages qui habitent cet asile, que de ceux (les auteurs) qui traversent pour un temps leurs espaces de vie
et cette phrase (me) touche souvent presque par surprise. Comme ici par exemple
« ce drap ça contient mon corps qu’il aille pas s’éparpiller »
(…a réveillé le drap de ma peau et lui a fait frisson)

Les photographies de Tina Kazakhishvili, m’ont évoqué les clichés pris d’un autre univers, dense en noirs et blancs, en personnages recroquevillés, en lieu qui serrent l’âme.
Les photos de Renée Taesch dans « Portrait de groupe avant démolition ». (voir quelques images ici http://www.solest.com/galerie/taesch.html les textes sont de Denis Robert)
Même proximité, même pudeur, simplicité du regard, même confiance de celui dont on immobilise la présence.

Je lis « Asile » et je suis enchanté d’un sort qui touche autant mon corps
[qui inconsciemment se recroqueville à la vue d’une image, ou à la lecture des mots]
que mon esprit
[ivre, touché par le vertige – parce que cet abîme est proche … bien plus proche qu’il n’y parait.]

Lisez « Asile » vous en reviendrez plus humain

eux aussi.

_____
* Maryse Hache écrit sans ponctuation

L’effet qui produit sa cause qui produit son effet qui …

Depuis que la nuit des temps a vu le jour
les femmes, conscientes de l’énergie parfois excessive
dont leur compagnon regorge
ont cherché à occuper l’homme par de multiples travaux
souvent inutiles mais propres à le détourner de la plus efficace des dépenses d’énergie
à savoir la guerre.

Au commencement

Depuis que le jour laisse périodique sa place à la progéniture de la nuit des temps
excepté en ces terres de maison astrologiques évanescentes
l’homme n’a cessé de chercher à échapper aux multiples travaux – lesquels lui paraissent souvent tout à fait inutiles – que lui réclame sa compagne.
Et ce notamment par le moyen qu’il a éprouvé comme le plus efficace – que ce soit ponctuellement ou définitivement – à savoir la guerre.

Je dois vous quitter.
J’ai une étagère à installer … à moins que …

(Dénonciation anonyme) Lélio Lacaille subventionne la subversion

Lélio Lacaille subventionne la subversion--

(Pour agrandir, cliquer sur l’image)

La preuve est là, photographiée par un de ses voisins alors que Lélio Lacaille était parti errer dans les montagnes environnantes :
Lélio Lacaille soutien activement la subversion.
Ici un agent d’infection reconnu comme parasite, et qui plus est, appartenant à une famille condamnée à mainte reprise pour des délits majeurs, est abreuvé, soutenu, protégé.

Lélio Lacaille subventionne la subversion2--Le délit vu de plus près.
On remarquera l’arrogance et la couleur provocante.

Au commencement – 2 –

Au commencement il y avait
TOUT

Les terres et les mers
la course des eaux et des nuages
des bêtes
des plantes et des roches
la lumière
celle qui venait du ciel et l’autre
jaillissant en secret de tout ce qui portait vie

Au commencement il y avait
ce Tout

Mais on n’en savait RIEN
le scribe son stylet et ses colonnes
n’était pas encore là.

le livre des nombres

Retour

Ils marchaient dans ce pays de chênes verts, de rocailles, de thym et d’autres verdeurs pauvres  mais odorantes,  depuis bien avant le jour.

A présent le crépuscule, nuages rougeoyants et ciel d’un bleu resserré, leur faisait face, au gré des hésitations de la sente sur laquelle ils progressaient.

A chaque nouvelle vision de cette lueur déclinante un peu de courage leur revenait mais dans l’instant suivant, le découragement les reprenait avec  plus de violence. Alors, un flot d’interrogations, de reproches même, à l’adresse de ceux qui les menaient, envahissait leur esprit et leurs jambes étaient assaillies de crampes nouvelles.

– Nous allons vers l’Ouest ! C’est parfait !

– Tu t’y retrouves toi ? Avec tous ces méandres que fait le chemin !

– Je te dis que c’est par là. En gros, nous allons vers l’Ouest.

– Peut-être que c’est la bonne direction, mais que ça n’y va pas ?

– Je ne comprends pas ton charabia !
Cela fait des années que personne n’a emprunté cette piste. Il n’en reste que le passage des chevreuils et des sangliers, mais c’est notre chemin !

– Tout de même …

– Tu as autre chose à proposer ?

– …

Le sentier n’était plus à présent qu’une corniche étroite. D’un côté un grand vide de plus d’une vingtaine de mètres tapissé en son fond d’une brume qui empêchait d’en discerner les limites. De l’autre le grand corps de la falaise. Une paroi tout aussi verticale dans laquelle on pouvait voir, de temps à autre, très haut au-dessus des têtes, d’immenses cavités circulaires que seules les eaux d’un déluge biblique avaient pu creuser, modeler, polir.

Luce était émerveillée par les rondeurs sensuelles de ces nombrils géants qui s’ouvraient sur les profondeurs de la montagne.

Quels enfants ont bien pu naître de cette mère si massive, si sombre, si lente ?

Imaginer les « enfants » de la falaise faisait oublier à Luce la fatigue qui s’était emparée de son corps, la douleur de certains de ses muscles et les ampoules qu’elle devinait baignées de sang sans ses chaussures.

– Quelqu’un pourrait glisser. Il va falloir nous encorder.

– Tu as raison. C’est vraiment très étroit et avec tous cette caillasse au sol…

– Dis à Joé de faire passer l’ordre et une des extrémités de la corde qu’il porte. Que chacun la fixe par un mousqueton à sa ceinture.

– Dis-lui aussi de nous passer l’autre bout lorsqu’il se sera lui-même encordé.

La nuit était tombée, mais heureusement, peu de temps après, une lune emmaillotée de nuage qui parvenait cependant à diffuser un peu de sa clarté s’était levée derrière eux.

lune halo

L’astre, à présent juste au-dessus de leurs têtes, donnait à voir son beau visage énigmatique au centre d’un grand disque de ciel clair, piqué de quelques étoiles. Tout autour du halo lumineux ainsi formé, sur le reste du ciel, régnait une pale lueur laiteuse triste et oppressante.

Hommes et femmes, écrasés de fatigue avançaient sous cette lueur, les mains fixés sur une corde qui leur donnait la cadence.

Certains dormaient par intermittence, pendant quelques mètres, se réveillant invariablement tous les dix pas qu’un automatisme comptait pour eux dans leur sommeil. D’autres n’étaient guère plus éveillés et se laissaient guider par les oscillations lentes de la corde et ses changements de direction.

Lorsque la tête de la colonne s’arrêta, beaucoup faillirent perdre l’équilibre en heurtant celui qui les précédait. Mais il n’y eut pas de grand dommage. Quelques casquettes qui finirent dans les brumes du précipice, à présent invisibles, mais aucune perte humaine.

– Le chemin s’arrête ici, il devait y avoir un pont.

– A présent que la lune a disparu on n’y voit plus grand-chose.

– Sur ma carte il y a un pont qui enjambe une rivière .

– Quel genre de rivière ?

– Importante, de l’eau toute l’année en quantité.

– Quelle profondeur ?

– Une grande rivière. Au moins cinq six mètres.

– Tu es sûr de toi

– Impossible de se tromper. Nous avons avancé vers l’Ouest, c’est le seul endroit possible. Nous sommes au-dessus de l’innghe, plus de pont, il faut sauter !

– Quoi ?

– Nous ne sommes pas venu jusque-là pour faire demi-tour, d’ailleurs c’est maintenant impossible. Il nous faut trouver de l’eau, à manger … et nous sommes si près du but

– …

– Tu vois une autre solution ?

– …

De sa voix de chef, Il avait expliqué à tous la situation , une voix qui pouvait être douce, grave, volontaire tout en communiquant de l’énergie à son auditoire. Tous s’étaient tu, la fatigue y était certainement pour beaucoup, mais surtout, personne n’imaginait faire tout ce chemin en arrière.

On avait convenu qu’ils resteraient encordés. Une fois dans l’eau les meilleurs nageurs soutiendraient ainsi plus facilement les autres. Et il serait toujours temps, alors, de se détacher pour ceux qui le voudraient.

Ils avaient sautés.

Luce n’avait entendu ni giclement d’eau, ni cri. La brume de plus en plus épaisse avait tout recouvert de son silence.

Elle ne regrettait pas d’avoir, à l’insu de tous, détaché son mousqueton.

Seule à présent, elle contemplait la montagne, la lune était réapparue. A quelques mètres au-dessus d’elle se trouvait un de ces orifices qui l’avait fait rêver pendant sa marche.

tourbillonLuce parvint à escalader la paroi. Elle pénétra dans la cavité, un son de coquillage marin, presque une musique, lui parvint aux oreilles.

Après être restée quelques secondes à l’écouter, Luce repris sa marche.

L’obscurité se fit peu à peu dans ce couloir de chair figée, Luce se sentait en sécurité, protégée, de plus en plus proche lui semblait-il d’un lieu qui l’attendait après qu’elle l’ait quitté un jour, à regret.

-o-0-o-

halte

Il aurait fallu
se soustraire quelques instants
le temps d’une petite éternité
juste pour sentir
en regardant glisser les nuages
d’où vient le vent

alors on aurait su
l’avenir des prairies, des déserts
des arbres et des bêtes
les lieux en promesse de vie
les roches en enfance
les sources en chrysalide
et peut-être même
le point d’où le prochain soleil
fera l’aube nouvelle

Alors on se serait remis en chemin