Au-delà des murs

Quitter la demeure confortable des souvenirs

Chasser de l’esprit le limon de bonheur, traces laissées d’anciens plaisirs. Tout ce qui est né d’elles en désir pour le beau, la saveur, la rencontre de l’autre.

Purger l’intérieur, extirper toute parcelle joyeuse, lessiver les parois, du crâne, du cœur, de la peau. Plus trace de caresse, empreinte de lèvre. Que le pas oublie l’accueil du chemin, de tout chemin et leurs promesses.

Qu’un brouillard plus dense que la pierre avale l’horizon.

Alors, le regard vague, où la seule lumière est celle de la crainte, prendre à pleine main le flacon qui circule de bouche en bouche, se verser une large gorgée de son jus acre, puis une autre. Lui faire poursuivre sa ronde en la laissant à la main qui se tend.

Bien plus tard, mangé de silence, étendre le corps, soulever du sol la tête d’un habit roulé en boule ou d’une chaussure retirée.

Croiser le regard d’un autre, étendu lui aussi. Apercevoir alors ce que le néant y cachait, ce qui reste de l’être et qui ne disait rien.

Oui l’âme est dévastée
mais ses ruines sont belles


La photo est de René Taesch* (issue du livre écrit avec Denis Robert « Portrait de groupe avant démolition ») qui m’avait autorisé à l’utiliser avec ce poème.
René est décédé, il y a trois ans, d’une longue maladie : la vie à vif

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* René m’a raconté qu’il lui était arrivé à plusieurs reprise, dans la période la plus sombre de sa vie, de se réveiller aux pieds du lit qu’il avait occupé des années auparavant, à l’orphelinat (on dit foyer de nos jours) de Plappeville (Metz)

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