Alph

Le faire parler de ses rencontres ?
Il faudrait pour cela
qu’il se réveille au milieu de sa nuit,
y déchire son rêve.
Il ne goute rien plus
que le demi-sommeil
les deux paupières dépliées.
Pourquoi choisirait-il
de perdre ce toucher
avec pour seule compensation
l’œuf de Raison
et son infini bric à brac
?

Animal la mAin

Le sabre,
à couper des têtes,
à ouvrir le ventre des belles,
à faucher la descendance de l’ennemi
en fleur.
Le sabre,
à la lame claire
obéissante – crois tu –
aussi fulgurante que la pensée,
à la franchise lumineuse,
simple comme le fil de la jeune lune
Le sabre,
au cœur de toutes les aventures,
qu’il faut sans trêve plonger dans le vivant,
l’éloigner de la rouille.
Le sabre,
qui n’existe que dans son mouvement
lorsqu’il menace
lorsqu’il fouille.
Le sabre,
dont tu n’es qu’une des montures
– le servant, le bois, la figure –
te tient plus fort que tu le crois,
ferme ta pensée, et tu ne vois
rien d’autre sur le monde
que formes en batailles
et courbes dans le ciel à tracer
Jusqu’en cette clairière
où tu ignores être né.

Orvieto

Ces murs au temps vide
L’espérance de quelques portes
Et toi qui attend

Des milliers de traces
Chemins qui guident les pas
Ces lieux que l’oeil voit

Un banc hors ce monde
Attend le voyageur perdu
Pour SE reposer

Le ciel, la nuée

Une pluie
douce
celle que j’attendais
est venue
silencieuse
sur la campagne et ses champs épuisés
tout contre le village étonné
dans le jardin
qui s’impatientait
derrière ses pierres
et son lierre mêlés

Le ciel s’est approché du monde des H
amical
caressant
doux d’une eau qui bruinait en lui

L’un et l’autre ont empli l’espace
jusqu’à la source des fleurs
saisissant le vol des corbeaux
modulant leur cri

Cette présence amicale et brouillonne
parmi les H,
murés de transparence,
seuls les sourds et les illettrés
la ressentaient

le ciel, la nuée
leur odeur et leur toucher
l’amant et l’aimée


Les vois-tu s’embrasser ?

Chez « Avec philosophie (France Culture) Pierre Guenancia A-raisonne David Abram, censé sombrer

C’est ici, Sur France Culture.
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/avec-philosophie/la-nature-a-t-elle-cesse-de-nous-parler-7852351

Beaucoup d’agressivité chez (Pierre Guenancia) ce philosophe spécialiste de Descartes (qui devrait lire Tommaso Campanella… lequel a « Cogité » avant notre héro national, mais ne s’en est pas tenu là)
L’erreur commise par ceux qui ont trouvé à lire dans l’oeuvre de David Abram, a été d’évoqué la poésie qui se dégageait de ces écrits.
Pierre Guenancia a aussitôt rebondit sur ce terme pour déqualifier le propos.
Poétique est pour beaucoup de scientifiques un indice de manque de rigueur.
Puis très vite il a considéré (renversant l’agression) qu’on lui imposait, ce qu’on lui proposait. La messe était dite.

Amusant passage lorsque Pierre Guenancia dit « Un nuage* exprime la tristesse » et autres projection de ce type alors même qu’il condamne l’anthropomorphisme de D. A. (*le nuage de SA culture)
On sent que la peau frémit d’une colère sourde chez Pierre Guenancia
lequel se permet de déclarer que David Abram* a « sombré » (dans l’animisme)
(*Lui qui dit « je ne suis certain de rien »)
Pierre Guenancia demande/exige qu’on lui « explique comment faire » pour
percevoir ce qu’il ne perçoit pas.
René Daumal y verrait l’un de ses scients
découpeur de lapin en ses parties pour comprendre la vie.
Pierre Guenancia veut qu’on lui dise comment il est possible de savoir que la nature parle.
Quelle exigence ! On peut décrire comme il le dit le génome humain avec des mots, mais il serait bien en peine de faire comprendre avec des mots comment le génome permet de produire les caractéristiques divers d’un être vivant. (au-delà du « bouton » et de l’effet, le trajet et son paysage)
Amusant débat aussi sur le doute à propos de l’influence de la civilisation occidentale sur les civilisations « indigènes » (on oublie souvent des pays conquis.)
Il suffit de voir plus près de nous l’influence qu’a l’apprentissage de la lecture sur des analphabètes (le gain se soldant par une disparition d’autres « capacités » dont par exemple certaines qualités de la mémoire.)
Le débat qui aurait pu, sans l’animosité présente, s’ouvrir sur l’évolution numérique du langage (contour précis des mots qui deviennent « normés ») avec disparition progressive de la nuance (ce qui n’est pas scientifique est ésotérique, etc.) n’était pas possible dans ce lieu de combat asymétrique (calme de l’un, fureur sourde de l’autre)
Car s’il y a une expression de la nature, assimilable à un langage, … du domaine du continu tout comme les modulations d’une rumeur .
S’il fallait réponde à Pierre Guenancia concernant sa fausse demande (il fonctionne comme s’il avait posé sa question à un muet, il n’attend pas de réponse)
on pourrait lui suggérer :
de s’assoir dans une pièce sombre, attenante à un jardin, pendant quelques instants, puis d’en sortir … et de S‘écouter, pour tenter de percevoir ce que son corps à reçu.
Mais, ceux qui regardaient dans la lunette de Galilée ne voyaient pas de cratères sur Lune
(Dans la fameuse phrase « Lorsque le sage montre la lune, l’imbécile regarde le doigt »
c’est bien le doigt qu’il faut regarder !
Cette réalité proche de nous qui a autre-chose à nous apprendre que
ce qui se trouve … là où certains localisent un dieu … où la clé ultime (ce qui revient au même ?
)


On redécouvre peu à peu des penseurs de la réalité vivante tels que Benjamin Fondane et Léon Chestov peut-être qu’il est temps de remettre un peu de complexité (le propre du vivant) dans les mots qui dérivent vers la complication (d’un vocable on en fait deux avec des contours plus … précis
il n’y a pas qu’aux frontières du Mexique et d’ailleurs qu’on construit des murs)

Un bon geste : prêtons une échelle à Pierre Guenancia pour voir au-dessus du mur de La Raison.
C’est, je crois, autorisé aux philosophes …

Passeggiata

Tous les pas se ressemblent
Aucun pas n'est semblable.
Il marche,
sur la surface anonyme du trottoir,
dit bonjour au chat
au chaud sur sa fenêtre,
salue le réverbère
éteint en son sommeil diurne.

Tous les pas se ressemblent
Aucun pas n'est semblable.
Il marche,
sous la pluie clémente,
presque amicale
qui floute sa vue,
mouille sa joue

Tous les pas se ressemblent
Aucun pas n'est semblable.
Il marche,
sur la grand route,
sur la bande étroite
d'herbe maigre
que les labours et le goudron
ont épargné.
Une boite de bière
un paquet de cigarette...
le vide
l'abandonné
l'accompagnent.

Tous les pas se ressemblent
Aucun pas n'est semblable.
Il marche.
Le bois,
la masse sombre du bois
l'entoure,
menace muette.
Une biche étonnée débouche devant lui...
Une auto silencieuse, vive, brutale,
évite l'animal,
...sur lui.

Tous les pas se ressemblent
Unique est le dernier.